Il s’agit probablement de la règle la plus importante à connaître avant le départ d’un triathlon : le drafting est-il autorisé ou interdit ? C’est un point de règlement très particulier à notre discipline mais qui change la dynamique, la stratégie & le déroulé des courses. On vous résume tout ce qu’il faut savoir dans notre guide, pour se préparer au mieux & éviter les sanctions !
Qu’est-ce que le drafting ? Définition.
Le drafting, ou aspiration-abri, désigne le fait de profiter de l’aspiration du concurrent devant soi en se plaçant dans sa roue. On parle donc ici de la partie cycliste du triathlon, même si l’on peut extrapoler le drafting aux 2 autres disciplines (on y revient plus tard). En effet, contrairement aux courses cyclistes, certaines épreuves de triathlon ne permettent pas de rouler en groupe et d’être dans la roue d’un concurrent.
Le drafting, qu’est-ce que ça change ?
Le drafting permet, pour le coureur « suiveur », de bénéficier de l’aspiration aérodynamique créée par le(s) coureur(s) placés devant lui, tout en le protégeant de la résistance à l’air. On estime que rouler « dans les roues » permet d’économiser entre 10 et 40% de puissance comparativement au coureur en tête du groupe, et surtout de réduire quasi à néant la résistance à l’air.
Une simple image résume bien la différence d’efforts selon la position dans un peloton :
On comprend donc aisément que les courses avec drafting peuvent avantager les « moins bon rouleurs » qui peuvent profiter du phénomène d’aspiration du ou des concurrents présents devant. Il favorise aussi la coopération car les triathlètes peuvent prendre des relais et ainsi évoluer plus rapidement qu’un coureur isolé.
Sans drafting, la partie vélo se déroule en « contre-la-montre » individuel, où l’athlète est seul dans son effort et ne peut bénéficier de l’aide d’autres concurrents.
Les impacts sur la tactique de course
On dit souvent que les courses où le drafting est autorisé sont idéales pour les « nageurs-coureurs ». En effet, les écarts creusés pendant la partie cycliste sont bien plus limités et bien souvent, hormis les regroupements en groupes, les positions bougent peu !
Ce qui implique qu’il est judicieux de faire un effort supplémentaire en natation afin de sortir en meilleure position de l’eau et donc d’avoir les meilleurs chances « d’accrocher un bon groupe ».
Mais au fait, pourquoi le drafting est parfois interdit ?
Vous devez sûrement vous demander pourquoi le drafting n’est pas accepté sur toutes les épreuves. Le triathlon est avant-tout un sport individuel prônant le dépassement de soi et la capacité à réaliser un effort en solitaire sans aide extérieure. Drafter, c’est à la fois collaborer entre athlètes et pour certains, s’économiser en se cachant dans un groupe. Pour les puristes, cela va même à l’encontre des valeurs prodiguées par ce sport.
Néanmoins, le plus souvent pour des raisons purement pratiques – un petit circuit ou un nombre important de concurrents -, l’interdire serait impossible. Il est donc régulièrement autorisé sur les triathlons XS et S voire M. Sur les épreuves olympiques, de coupe du monde (WTS) et les manches de Grand Prix de FFTri (et globalement sur toutes les épreuves de haut niveau en Courte distance), il est autorisé.
Aujourd’hui, les deux types d’épreuves cohabitent et permettent de répondre aux envies des coureurs.
Quand est-il autorisé ou interdit ?
Sur les courses régies par la FFTRi, le drafting (appelé officiellement « aspiration-abri ») peut donc être autorisé ou interdit. C’est au libre choix de l’organisateur mais dans les faits, le drafting n’est toléré que sur certaines distances.
On peut seulement affirmer qu’il est systématique autorisé sur :
- Les épreuves de haut niveau sur Courte distance (Jeux Olympiques, WTS, D1/D2)
Et il est systématiquement interdit sur :
- Les épreuves Longue Distance (L, XL, XXL/IRONMAN®)
Pour tous les autres cas, c’est l’organisateur qui décide et donc il faut se reporter au règlement de l’épreuve.
Quelles sont les règles à respecter en cas d’interdiction ?
Quand il est prohibé, il faut respecter certaines règles. Tout d’abord, vous devez rouler à plus de 7m du concurrent qui vous précède sur un triathlon XS, S ou M. Sur les plus longues distances, cet écart est porté à 12m.
Lorsque vous souhaitez doubler le concurrent devant vous, vous avez 25 secondes (une fois la limite des 7 ou 12m entamée) pour le faire. Au-delà vous risquez une pénalité. La distance est théoriquement mesurée entre les roues avants de chaque vélo. L’adversaire que vous doublez doit aussi s’assurer de ralentir afin de laisser rapidement la distance nécessaire.
Outre l’espace en longueur, il faut aussi respecter une largeur latérale lorsque l’on double un vélo. Cette distance doit correspondre à la largeur du cycliste.
Toutefois, il existe deux situations où le triathlète ne devrait pas être pénalisé : lors de l’entrée ou de la sortie d’une aire de ravitaillement ou de transition, ainsi que dans un virage très serré.
Il faut aussi savoir que rester derrière une voiture ou un deux-roues motorisé n’est pas non plus autorisé. Une distance de 35m doit être respectée avec les voitures et de 15m avec les motos.
Quelles sanctions en cas de drafting ?
Le drafting est un point particulièrement surveillé & sanctionné par les arbitres. L’athlète risque, s’il est pris en flagrant délit de drafter, un arrêt en « penalty box ».
- 1 minute de pénalité sur un triathlon XS ou S
- 2 minutes sur un M
- 5 minutes sur un L/XL/XXL
Cette pénalité est à effectuer juste avant la 2nde transition (règlement FFTri 2020) et consiste à s’arrêter dans la zone de pénalité pendant le temps imparti. Si vous ne faites pas cette pénalité, vous risquez l’exclusion de l’épreuve. > Lire notre article sur Les sanctions en triathlon.
Les spécificités du drafting sur IRONMAN®
L’organisateur de courses IRONMAN® applique son propre règlement. Sur toutes ses courses, le drafting est interdit et la zone d’aspiration-abri est de 12 mètres de long. Une petite spécificité s’applique : il est interdit pour les athlètes doublés d’entraver la progression d’autres athlètes (typiquement, de ne pas se laisser doubler). Une sanction pour blocage est prévue.
Parfois, en regardant les professionnels en tête de course, vous observerez qu’ils « se relaient » en tête, tout en conservant les 12 mètres de séparation imposés. C’est une manière de jouer avec la limite des règlement, mais qui peut se faire sans la moindre infraction et qui permet de collaborer en bénéficiant de l’effet psychologique du groupe.
Mais le plus gros souci pour faire respecter l’interdiction de drafting sur distance IM se situe dans le gros du peloton : on observe trop souvent des packs de coureurs se former, souvent dans le milieu du classement. Est-ce de la triche avérée ou l’impossibilité de faire autrement avec autant d’athlètes réunis ? Probablement un mélange des deux.
Les organisations commencent à adopter le rolling-start en natation, qui permet d’étaler les départs. Peu envisagent de diminuer le nombre de concurrents sur leurs épreuves pour le moment. Et pour les concurrents qui se retrouvent pris au milieu d’un groupe involontairement, comment faire pour éviter d’enfreindre la règle ? Pas de solution miracle lorsqu’on se retrouve à 5 ou 10 athlètes dans la zone théorique des 12m : se laisser doubler ou se déporter un maximum sur le côté pour se sortir de la zone. En tout cas, montrer de la bonne volonté en ne restant jamais juste derrière un concurrent.
Nos conseils pour les courses avec drafting
Sur les courses où cette pratique est autorisée, il est intéressant – voire indispensable – d’en profiter. Voici quelques conseils pour bénéficier au maximum des effets de l’aspiration et du drafting :
- Se positionner le plus proche possible de la roue arrière du concurrent devant. A 50cm du vélo de devant, le phénomène d’aspiration est déjà bien moindre.
- Commencez par vous entraîner à deux en alternant les positions.
- Prenez en compte la direction du vent. S’il vient de côté, abritez-vous légèrement en quinconce afin d’être protégé à la fois du vent mais aussi de l’air en frontal.
- Ne pédalez pas par à-coups, mieux vaut conserver un pédalage fluide et régulier.
- Anticiper les virages, plus vous serez loin dans la file des coureurs, plus l’effort de relance sera important.
- Dans les 1ères positions d’un groupe, on s’abrite légèrement moins bien mais on peut garder un œil sur la course et être plus attentif à la moindre attaque. A l’arrière d’un groupe, on peut vite subir et au final perdre plus d’énergie que si on roulait seul.
- Très vite, essayez de perdre l’habitude naturel qu’est de regarder la roue de devant. Mais restez toujours attentif, les mains proches des freins, le regard toujours porté vers l’avant pour anticiper.
Et l’aspiration dans les autres disciplines ?
Le drafting en natation
En natation, il existe aussi une forme évidente de drafting. Il s’agit d’un effet similaire à celui observé en cyclisme : le fait de se situer derrière un concurrent permet de bénéficier de son aspiration et de diminuer les résistances frontales. Maîtriser le drafting en natation permet au triathlète de dépenser moins d’énergie et donc de se préserver pour les deux épreuves suivantes. Cette forme d’aspiration est bien sûr autorisée et il faut en profiter !
Comment bien drafter en natation ?
- Choix 1 : Se positionner dans les pieds, aussi près que possible
- Choix 2 : Se positionner légèrement sur le côté, la tête à hauteur de hanche du nageur vous précédant
- L’idéal est de se situer à moins de 20cm mais sans toucher constamment les pieds (c’est insupportable pour le nageur devant)
- Entraînez-vous à rester dans les pieds de vos copains de club à l’entraînement
- Vous avez le choix de votre stratégie :
- Essayer de suivre un nageur plus rapide que vous (mais le risque est de vous mettre dans le rouge pour le reste de l’épreuve)
- Prendre les pieds d’un nageur de votre niveau pour économiser de l’énergie
L’autre avantage non négligeable en eau libre : si vous vous assurez que le nageur devant prend les bonnes trajectoires, vous pourrez largement limiter vos coups d’oeil vers les bouées… Ce dernier le fait « à votre place » et vous n’avez qu’à suivre ses pieds. Mais comme en vélo, prenez des relais et partagez les efforts !
Du drafting en course à pied ?
L’effet d’aspiration est bien moindre – presque négligeable – en course à pied même s’il existe. Souvenez-vous des lièvres d’Eliud Kipchoge lors de son marathon sous les 2h en 2019 : 5 coureurs devant lui pour donner le rythme mais aussi pour jouer les abris. Mais on parle là d’optimisation extrême de la performance.
Pour le commun des mortels, se placer dans la foulée d’un(e) concurrent(e) joue surtout sur l’aspect mental. On se focalise sur l’athlète devant pour l’émulation !
Crédits photos : SuperLeagueTriathlon.com, Herbert Neubauer / AFP, FFTri.fr